Le rôle crucial de la remanufacture dans l'économie circulaire

Qu'il s'agisse de ce que nous mangeons, de nos déplacements, des vêtements que nous achetons ou des produits que nous utilisons, toute décision que nous prenons a inéluctablement des conséquences. La durabilité repose sur des actions. Si quelques simples changements durables dans notre vie quotidienne peuvent effectivement déboucher sur une réduction importante des émissions de CO2, tout impact positif déterminant en la matière ne peut que procéder d’un changement de paradigme à l'échelon des pouvoirs publics et des grandes organisations.

Les possibilités d'aide et de soutien ne manquent pas pour les grandes organisations en quête d'une plus grande durabilité. Il appartient à ces organisations, au gré de leur secteur, d'identifier les domaines à impact majeur et, dans le sillage de l'objectif de neutralité climatique de l’UE à l'horizon 2050, d'isoler les segments - investissements, recherche et innovation - qu'elles sont susceptibles de soutenir et promouvoir au mieux de leurs moyens.

Quel que soit le secteur, toutefois, il est un principe auquel toutes les organisations peuvent souscrire - avec effet significatif garanti : la remanufacture.

La filière des 3R - "réduction, réutilisation, recyclage" - est d'une simplicité trompeuse. Elle est facile à appliquer aux activités des entreprises et aux habitudes des consommateurs individuels. Il est possible de réduire considérablement les déchets en limitant les pratiques dommageables pour l'environnement, en réutilisant les objets et matériaux et - faute de mieux - en recyclant autant que possible.

L'économie circulaire relève d'un modèle de production et de consommation comparable. Il s'agit d'une directive clé du Green Deal européen qui repose sur les principes de la réduction des déchets, de la réaffectation des produits et services gourmands en ressources et de la réaffectation des matériaux "usagés". Elle désigne une économie axée sur le réemploi des produits. Grâce au prolongement du cycle de vie des objets que nous utilisons, on produit moins à partir de zéro, ce qui induit une réduction significative des émissions liées à l'approvisionnement et au traitement des matières premières ainsi qu'à la déconstruction des articles recyclés.

En prônant un modèle qui s’attache à générer le minimum de déchets, l'économie circulaire instaure une démarche de consommation plus durable. Selon les estimations, il semble que l'adoption généralisée de l'économie circulaire en Europe serait à même de réduire les émissions de CO2 de moitié d'ici à 2030.

L'industrie technologique a été beaucoup plus lente à s'adapter à ce modèle de réduction des déchets, notamment par suite de la complexité de la production. Cette production de technologies est un processus gourmand en ressources, avec des matières premières et des méthodes de production qui peuvent peser plus lourdement sur l'environnement. Parallèlement, le développement continu a pour conséquence que les améliorations et mises à jour souhaitées se font plus rapidement que dans d'autres industries. Les organisations, cela va de soi, souhaitent se doter des appareils les plus récents et les plus performants.

La solution, c'est le recyclage. Les chiffres publiés par l''Agence européenne pour l'environnement montrent malheureusement que, pour les déchets électroniques, le rythme de recyclage est largement inférieur comparativement aux déchets municipaux ou ménagers. Ce modèle 'take-make-dispose' (extraire-fabriquer-jeter) n'est pas viable à long terme. La remanufacture recourt à une combinaison de pièces réutilisées, réparées et neuves pour produire un appareil intégralement "neuf". Contrairement aux appareils reconditionnés, les appareils remanufacturés sont entièrement démontés par des techniciens, soumis à un processus industriel de nettoyage et d'assemblage approfondi, puis testés et reformatés.

Le processus de remanufacture varie d'un appareil à l'autre, mais le but est toujours de conserver le maximum d'éléments de l'ancienne technologie tout en remplaçant les composants clés indispensables pour des performances optimales. Après une première évaluation, les pièces qui ne peuvent être réutilisées sont recyclées, tandis que les principaux composants sont démontés, réparés et reconstruits.

En conservant un maximum d'éléments d'un appareil, la remanufacture réduit le temps et l'énergie nécessaires à l'approvisionnement et au traitement des matériaux indispensables à la fabrication de nouveaux produits, tandis que ces matériaux servent à créer ce qui constitue essentiellement un "produit neuf". Ces appareils sont rigoureusement testés, nettoyés et reformatés - ils fonctionnent comme un produit tout neuf, avec l'espérance de vie correspondante.

De par la préférence généralisée pour le 'neuf', les produits remanufacturés sont traditionnellement considérés comme "inférieurs", quand bien même ils garantissent des performances optimales. Les organisations sensibles au concept de la remanufacture y puisent toutefois des options plus durables et plus économiques, sans concession aucune quant aux performances.

Selon toutes les apparences, le principal obstacle au modèle d'économie circulaire réside dans la méconnaissance, dans le chef des clients, des processus impliqués. Cette méconnaissance se manifeste notamment au travers des réticences à l'égard des appareils remanufacturés - alors que l'industrie de l'impression ouvre la voie avec une demande croissante d'imprimantes de bureau remanufacturées, par exemple, la remanufacture n'a pas encore pris vraiment pied dans le secteur des technologies.

Il faut s'attacher plus activement à sensibiliser les organisations aux avantages des appareils remanufacturés - en termes tant de réduction de l'impact environnemental que de réduction des coûts. Dès lors que les avantages de la remanufacture seront davantage reconnus, les fabricants seront plus nombreux à franchir le cap de la production circulaire. L'adhésion est un facteur important car, si l'on veut que les appareils puissent être efficacement remanufacturés à l'avenir, il faut vérifier à chaque stade quelles pièces peuvent être remplacées, quels assemblages peuvent être automatisés et quels éléments offrent une durée de vie plus longue.

C'est cette réflexion sur les processus, pilotée par le principe de réaffectation, qui favorisera le fonctionnement durable du secteur technologique à l'avenir.

Les organisations se doivent d'investir dans ces processus si elles veulent en récolter les bénéfices économiques et environnementaux par la suite. Parallèlement, les régulateurs et les gouvernements sont clairement tenus de prévoir un accompagnement plus dynamique afin que la remanufacture accède au statut de pratique industrielle standard.

En dépit de sa complexité, la remanufacturé est indubitablement appelée à générer un impact positif significatif au sein du secteur technologique. Plus vite les gouvernements, l'industrie et les entreprises s'engageront dans cette voie, et mieux ce sera pour l'avenir de la planète.